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16/03/2017

MAIS AVEC QUEL DÉGOUT

au magma présent de l'écriture,

 

MAIS AVEC QUEL DÉGOUT



C'est un univers tout à fait incohérent,
Une atmosphère lourde et difficilement descriptible.
Dans celui-ci, comme derrière tout masque authentique,
S'exprime sans retenue l'intransigeante part de doute
Et les égarements dangereux inhérents à toute pensée.

Il possède, par devers lui, quantité de forces insoupçonnables.
Des forces susceptibles de dynamiter les certitudes cumulées.
Il arrive de percevoir parfois quelques stridences de douleurs
Sur son visage brûlant secoué d'irrépressibles tremblements.

On le comprends dès lors niché au cœur d'un désastre général.
De lui peut surgir, à tout moment, d'inopinés éclats de violence
Dans l'agitation terrifiante d'éléments devenus incontrôlables,
De lourds nuages noirâtres pleurent une épaisse pluie de sang
Tandis que de terrorisantes comètes zèbrent sa conscience,
Éclairant son tréfonds d'une blafarde lueur de fin du monde.

Là, il trouvera la force de renaître à la vie, mais avec quel dégoût!


P. MILIQUE

01/07/2013

CHARLES BAUDELAIRE: LE JEU

 

CHARLES BAUDELAIRE

LE JEU

 

Dans des fauteuils fanés des courtisanes vieilles,
Pâles, le sourcil peint, l'oeil câlin et fatal,
Minaudant, et faisant de leurs maigres oreilles
Tomber un cliquetis de pierre et de métal;

Autour des verts tapis des visages sans lèvres,
Des lèvres sans couleurs, des mâchoires sans dent,
Et des doigts convulsés d'une infernale fièvre,
Fouillant la poche vide ou le sein palpitant;

Sous de sales plafonds un rang de pâles lustres
Et d'énormes quinquets projetant leurs lueurs
Sur des fronts ténébreux de poètes illustres
Qui viennent gaspiller leurs sanglantes sueurs;

Voilà le noir tableau qu'en un rêve nocturne
Je vis se dérouler sous mon oeil clairvoyant.
Moi-même, dans un coin de l'antre taciturne,
Je me vis accoudé, froid, muet, enviant,

Enviant de ces gens la passion tenace,
De ces vieilles putains la funèbre gaieté,
Et tous gaillardement trafiquant à ma face,
L'un de son vieil honneur, l'autre de sa beauté !

Et mon coeur s'effraya d'envier maint pauvre homme
Courant avec ferveur à l'abîme béant,
Et qui, saoul de son sang, préférerait en somme
La douleur à la mort et l'enfer au néant !