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12/08/2014

LES MOTS MANQUANTS

au magma présent de l'écriture

 

LES MOTS MANQUANTS

 

Il arrive parfois aux mots de n’en dire que le manque.

Il en est ainsi de mon actuel, aussi vide qu’asséché.

 

Je voudrais dessiner des phrases aux contours précieux,

Mais je m’éprouve comme frappé d’une soudaine inertie,

En proie au doute, à la sourde certitude de mon incapacité.

Sans cesse je me brise l’âme contre des phrases récalcitrantes,

Insatisfait à l’avance de ce que je ne saurai que si mal dire.

 

Je crois que j’attends trop de moi, et je ploie sous la déception.

Cela m’est douloureux, forcément douloureux, au-delà du trop.

Parce que des mots, même s’il s’avère souvent être les mêmes,

J’en ai plein le cœur. Mais lorsque la sève s’évapore, le mot meurt.

 

J’en suis à espérer que nul ne s’irrite jamais de mon médiocre silence.

 

P. MILIQUE

 

 

21/11/2013

LA PROMESSE D'UN FUTUR ÉCLATÉ

ECRIVAIN MAUDIT.jpg 

Caricature de René Schickele par Ludwig Meidner en 1913.promesse,fi

 

LA PROMESSE D'UN FUTUR ÉCLATÉ

C'est quoi un homme qui écrit avec son sang ?
C'est d'abord un homme qui souffre,
Et puis qui cherche aussi.

Qui fuit la lenteur des jours,
Meurtri de désirs désespérés
Et d'attentes muettes.
Absurdement.

Il se consume en confessions
Brûlantes et douloureuses
Comme autant de feux
Trop longs à s'éteindre.

L'expérience déjà lui a dit
Quelle farce pitoyable est la vie.
Alors, dans le silence insolent
Et solitaire de certaines nuits,
Il part, désabusé un peu,
A la rencontre problématique
D'un univers fugitif.

Beaucoup de persévérance
Dans ses mots charbons,
Des mots qui, nourris d'inéluctable,
Se teintent de brume, d'ombre et d'opaque.
Les mots d'une aube incertaine
Qui ne se lève jamais.
Sauf sur la promesse d'un futur éclaté...

Un homme qui écrit avec son sang,
C'est un homme qui restitue sa douleur.
Un autodidacte obscène et absolu
Qui délivre sa prose de survivant
Où le rire désincarné s'étouffe aussitôt, mort-né,
Tel celui, malsain, d'un aliéné
Dont l'esprit déchiré laisse périr les couleurs.


P. MILIQUE

 

09/10/2013

BONHEUR URGENT

au magma present de l'ecriture

 

BONHEUR  URGENT

 

Il sait qu'elle se perd dans un voyage intérieur

Aux prolongements irrémédiables et privés.
Il sait qu'elle se brise et s'affaiblit dans d'interminables insomnies.

Parce qu'il y a un trop plein de tout.

Trop plein de souffrances, trop plein d'espérances déçues.

Alors chaque nuit la laisse meurtrie, ensanglantée du dedans.

Sa sensibilité extrême est une source de terribles douleurs. Inacceptables...


Bien sûr qu'elle émeut par sa fragilité.

Mais elle bouleverse aussi par la force qui est la sienne,

Dans sa recherche forcenée d'une oasis de douceur,

Au milieu des troubles et des tourments qui font le quotidien.

(A SUIVRE...) 


P. MILIQUE

 

30/08/2013

LA BOÎTE A LETTRES: GUY DE MAUPASSANT A ROBERT PINCHON

 

LA BOÎTE A LETTRES

GUY DE MAUPASSANT A ROBERT PINCHON

BIBLIOTHÉCAIRE, JOURNALISTE, CRITIQUE DRAMATIQUE,

ET

AMI INTIME DE MAUPASSANT.

29/08/2013

LA BOÎTE A LETTRES: JEAN-MARIE SOTIN DE LA CONDIERE AUX CITOYENS DE LA LOIRE INTERIEURE

 

LA BOÎTE A LETTRES

JEAN-MARIE SOTIN DE LA CONDIERE

AUX

CITOYENS DE LA LOIRE INTÉRIEURE

28/08/2013

LA BOÎTE A LETTRES: STENDHAL A MADEMOISELLE SOPHIE D'UVAUCEL

 

LA BOÎTE A LETTRES

  STENDHAL A MADEMOISELLE SOPHIE D'UVAUCEL

(© Musée des Lettres et Manuscrits)

 

Mademoiselle Sophie d'Uvaucel, chez

M. le Baron Cuvier, an Jardin du Roy, à Paris.

     Rome, 28 Avril [1831].

 

     Mademoiselle,

 

Votre lettre me fait le plus grand plaisir. Je reviens de Saint-Pierre où il y avait une fête. Ma paresse me l'a fait manquer. J'ai trouvé le pavé de marbre de l'église jonché de fleurs et de feuilles de laurier. Ces feuilles un peu meurtries répandaient l'odeur la plus suave, point trop forte, ce qui convient à mes nerfs de jolie femme. Mon âme était bien disposée. Votre lettre a paru comme un jour doux destiné à frapper des yeux délicats. Dans mes jours de patriotisme ardent, elle m'eût indigné. Je méprise sincèrement, et sans haine, la plupart des gens que vous estimez. Pour se mêler d'affaires publiques, il faut de l'expérience. Peut-être M. Dejean, ou tout autre jeune homme nommé préfet par M. Guizot, sera-t-il un homme habile en 1840. Mais rappelez-vous que l'œil du public voit nettement et clairement au bout de six mois ce qui se passe dans le cœur de tout homme qui reçoit plus de 20.000 francs du budget et le rôle de Pénélope est dangereux. Mais parlons de fadaises. Vous avez vu quelques très jeunes gens faire de grandes fortunes. Soyez convaincue que quelles que soient les phrases et les apparences, pendant deux ou trois mois de leur vie, ils ont été comme Julien. De 1806 à 1813, j'ai été à peu près aide de camp de M. le comte Daru. Il était très puissant à Berlin en 1806, 7, 8, à Vienne en 1809. J'étais dans une sorte de faveur à Saint-Cloud en 1811. Je vous assure que personne n'a fait une grande fortune sans être Julien. La forme de notre civilisation exclut les grands mouvements, tout ce qui ressemble à la passion.

 De là, le rôle pitoyable des femmes. La société actuelle ne les emploie que comme intrigantes. Voyez MMmes Récamier, Pastoret, Rumfort. Il faut pour avancer être doux, humble, faire vingt visites en bas de soie par semaine. Un jour que le protecteur s'ennuiera, un jour de pluie à Saint-Cloud, au mois d'octobre, un trait de bassesse bien placé vous vaudra une préfecture. Je méprise les charges. Julien n'est pas si futé qu'il vous le paraît.

 Le jeune homme de dix-huit ans est niais à Paris. Il songe toujours au modèle à imiter. Et quelques-fois il y a quatre règles contradictoires sur la façon dont il faut tirer son mouchoir de sa poche chez une duchesse. Cette perplexité au moment où il s'agit de choisir entre des règles contradictoires, aidée par les trois changements de tenue par 24 heures, qui ont lieu à Paris est cause de la niaiserie. Nos jeunes paysans du Dauphiné savent très bien suivre leur intérêt. J'aime à discuter sur le cœur humain, chose difficile avec les Françaises, qui presque toujours mentent pour se conformer à la règle 1451 qui régit leur conduite ou à la règle 8.600. Votre lettre est infiniment plus sincère qu'aucune que vous m'ayez écrite. Elle ne blâme pas assez le roman en question. Vous avez adouci. Il fallait m'écrire le premier jour. II y avait à Venise un homme qui, pour aimer sa femme, avait besoin qu'elle lui donnât des soumets. Je suis cet homme. Rien ne m'ennuie comme le compliment. Si j'en avais 10.000 comme cela, pense-je, on me ferait baron et académicien. Mais que faire d'un fagot ou deux? Cela ne suffit pas pour chauffer le four. Soyez donc, je vous en supplie, Mademoiselle, ultra-sincère avec moi plus le soufflet sera fort, plus je sentirai la vie.

Mme Az[ur] me croit l'original de Julien parce que pour être nommé Inspecteur du Mobilier, le général Duroc qui m'aimait (par parenthèse à cause de ma sincérité) voyant fils de noble chevalier Beyle dans mon extrait de baptême, me donna le De Beyle dans le projet de décret qui fut signé le 11 août 1810. Alors commença pour moi l'époque du plus grand bonheur. Pour en revenir, la lettre de Mme Az[ur] qui m'accable des plus grands mépris, a fait toute ma joie pendant un voyage que j'ai fait à Capo d'Istria et j'y songe encore après un mois. Si j'avais voulu faire le Julien dans le salon de M. Aubernon, chez M. Pastoret que je ne suis jamais allé voir au Luxembourg,' chez M. de Lafayette, etc., etc., je serais tout au moins préfet de Guéret. Mais je serais destitué, car certainement j'aurais administré comme M. Pons de l'Hérault, préfet du Jura. Gardez cette ligne pour vous. Elle me porterait dommage dans ma retraite. De 15.000 je suis tombé à 10.000.

Si je tombais plus bas, il n'y aurait pas moyen de vivre avec la dignité nécessaire. Ici, je veux dire au midi des Apennins, le public n'est dupe d'aucune affectation. Vous avez beau vous étaler avec une noble négligence sur quatre chaises à la promenade, la canaille ne vous estime qu'au prorata de la dépense que vous faites. Nous avons pour ennemis les libéraux depuis Bologne1, les ultras depuis 1789. Le rôle d'un agent français est difficile, très difficile. Il faudrait en avoir moins et les mieux payer. Autrement je me renfermerai dans une nullité complète comme mon prédécesseur, qui s'est mis cependant à danser dans l'unique café de ma ville en apprenant la nouvelle des ordonnances du 25 juillet 2. J'ai passé cinq jours à Florence sans trouver le temps de monter à la Galerie ou d'aller au Palais Pitti. J'ai cherché la vérité, j'ai écrit quatre dépêches à mon ministre. Celle qui décrit ce qui a failli se passer à Florence vous amuserait.

Comme vous êtres Française, il faut ici placer une petite batterie contre le ridicule, donc. vous amuserait, non certes à cause du talent du narrateur, mais par le caractère plaisant des acteurs. Ma dépêche étant sincère aura déplu. Je me le disais en l'écrivant.

Mais par le plus grand des hasards, il peut se trouver un homme de mérite, un Mérimée, dans les bureaux, et je serais bien aise qu'il se dise « Celui-là n'est pas si niais que les autres. » A seize ans, mon père m'a donné 150 fr. par mois pour venir me faire recevoir à l'École Polytechnique. Or cela se passait en 1799. Les nigauds à demi-hypocrites que vous estimez vous mènent tout droit à la Grande Colère du Père Duchêne. Le tigre se réveillera pour repousser l'étranger qui nous méprise et nous donnera tant de soufflets qu'il faudra finir par où il fallait commencer. L'opération n'eût pas duré plus de six mois. Dans l'état actuel du malade, elle durera trois ans. Je vous offre refuge dans une forêt à trois lieues de mon endroit. Ceci est sérieux. Faute de bonne foi, vous êtes flambés. Comprenez-vous l'admirable finesse de mon langage ? Rien de mieux établi que notre correspondance. Rien ne se perd. Daignez donc m'écrire plus souvent. Mes respects à M. et à Mme C[uvier] et à Mme Martial. Dites à tous les niais que je suis devenu très grave, très profond, très digne du docto corpore où je suis. Au fond quelques phrases plus ou moins piquantes me coûtent 5.000 fr. C'était tout le superflu, chose si nécessaire. Ce malheur doit m'ôter la colère et l'envie des sots. Au reste j'ai pitié d'eux ils vont avoir une belle venette d'ici à quelques mois. Voulez-vous le remède ?

 

Recipe: Sincérité et bonne foi.

30/06/2013

L'INACCEPTABLE RÉFUTÉ

BUILLONNEMENT.jpg

 

L'INACCEPTABLE  RÉFUTÉ

 

Il sait qu'elle se perd dans un voyage intérieur

Au prolongement intime à l'infini.

Il sait qu'elle se brise et s'affaiblit peu à peu

Dans le noir fracassé d'interminables insomnies.

Parce qu'il y a un trop plein de tout...

Trop plein de souffrances,

Trop plein d'espérances déçues.

 

Alors chaque nuit la retrouve meurtrie,

Toute ensanglantée du dedans.

Sa sensibilité  exacerbée à l'extrême

Lui est source de douleurs terribles, inacceptables.

 

Bien sûr qu'elle émeut par sa déchirante fragilité.

Mais elle bouleverse aussi par la force qui est la sienne

Dans sa recherche forcenée d'une oasis de douceur désirée

Au milieu troubles tourments qui mâchurent le quotidien.

 

Et pourtant, avec la poigne irrésistible de l'espoir,

Elle réfute cette vie faite de trop de désenchantements,

En refuse d'instinct l'épuisement des instants

Pour mieux les voir persister dans leur éternité.

 

Le temps est venu pour elle de se laisser aller

A ce bouillonnement permanent qui impose

Que tout ce qui n'est pas merveilleux ennui,

Que tout ce qui ne fait pas rêver désespère.

 

En faisant de sa vie un long poème fou qui,

A peine murmuré, l'ouvrira au possible

De bonheurs éphémères, peut-être, mais urgents.

 

P.  MILIQUE

24/05/2013

SCULPTEUR DE MOTS

au magma present de l'ecriture,sculpteur,motiver,

 

SCULPTEUR DE MOTS

 

Il aime à se prétendre viking en acier trempé,

Alors que chacun le sait meurtri de bleus à l'âme...

 

Pour s'expurger de cette flagrance, il tente une écriture

Qui se tient tapie en germe dans l'urgence proposée

Et convoque, de sa lame effilée, des reflets d'inquiétude.

 

Confronté à des situations rapidement délicates,

Il s'applique à effectuer sur le texte un travail obsessionnel,

A le peaufiner encore, soupesant jusqu'à la dernière virgule,

Tâchant d'identifier enfin la portée de ces armes invisibles,

Qui constituent la tonalité intrinsèque des mots,

Et de cette autre, soulignée d'incertains silences,

Avec un peu plus de folie et davantage d'audace.

 

Puis il résume son rapport presque permanent au monde

En empruntant le chemin de halage d'une rare intensité

Qui accueille les pas de la silhouette qu'il aimerait devenir:

Ombre portée d'un sculpteur passionné de la langue et des mots.

 

P. MILIQUE

21/04/2013

BONHEUR URGENT

au magma present de l'ecriture,bonheur,urgence,

 

BONHEUR URGENT

 

 

Il sait qu'elle se perd dans un voyage intérieur

aux prolongements indéfiniment privés.
Il sait qu'elle se brise et s'affaiblit dans d'interminables insomnies.

Parce qu'il y a un trop plein de tout.

Trop plein de souffrances, trop plein d'espérances déçues.

Alors chaque nuit la laisse meurtrie, ensanglantée du dedans.

Sa sensibilité extrême est une source de terribles douleurs. Inacceptables...


Bien sûr qu'elle émeut par sa fragilité.

Mais elle bouleverse aussi par la force qui est la sienne,

dans sa recherche forcenée d'une oasis de douceur,

au milieu des troubles et des tourments qui font le quotidien.

 


Et pourtant, avec l'irrésistible force de l'espoir,

elle réfute cette vie faite de trop de désenchantements,

en refuse l'épuisement des instants pour les voir persister dans leur éternité.


Il est temps pour elle de se laisser aller à ce bouillonnement permanent

qui impose que tout ce qui n'est pas merveilleux ennui,

que tout ce qui ne fait pas rêver désespère.
En faisant de sa vie un long poème fou qui, à peine murmuré,

l'ouvrira à des bonheurs éphémères peut-être, mais urgents !

P.  MILIQUE

13/04/2013

GEORGES FOUREST : " BALLADE POUR FAIRE CONNAITRE MES OCCUPATIONS ORDINAIRES "

 

GEORGES FOUREST 

" BALLADE POUR FAIRE CONNAITRE MES OCCUPATIONS ORDINAIRES "

 

Poème de Georges FOUREST

Lu par Nicolas LORMEAU

 

La Négresse blonde, 1909 © José Corti

 

Né le 6 avril 1867 à Limoges, Georges FOUREST suit des études de droit. Il se qualifie ensuite d’"avocat loin de la cour d’appel", comme il aime à se nommer. Il vient à Paris, où il fréquente les milieux littéraires symbolistes et décadents, collabore à plusieurs revues (La Connaissance, Le Décadent) et se rend célèbre avec La Négresse blonde (Messein, 1909, rééd. Corti 1986), préfacé par Willy, et placé sous le patronage de Rabelais. Georges Fourest fera encore paraître Contes pour les satyres (Messein, 1923, rééd. Corti, 1990) et le Géranium ovipare (Corti, 1935, réé. 1984), qui respirent une même atmosphère ludique et lubrique. Il meurt à Paris le 25 janvier 1945. Après une période de désaffection, il est peu à peu redécouvert à mesure que se manifeste un regain d’intérêt pour la littérature 1900.    


« Georges Fourest était un poète français à la verve parodique et irrévérencieuse, jouant avec truculence de mots rares ou cocasses, des dissonances de ton, de l’imprévu verbal et métrique, des effets burlesques.

Quand j’ai connu Georges Fourest, il était dans la soixantaine et déjà célèbre. Il ne ressemblait pas plus à l’idée qu’un lecteur de La Négresse blonde pouvait se faire de lui que le Gracq qu’on imaginait au moment de la publication du Château d’Argol ne ressemblait au Gracq réel. Le poète, qui époustouflait les foules et rêvait d’un enterrement délirant, était un homme tout à fait posé et – sauf quand à Deauville il portait veste blanche et casquette de yachtman – vêtu de la classique et déjà désuète jaquette et coiffé du melon dont le règne touchait aussi à sa fin. Il avait l’air bonhomme d’un chef de bureau de ministère. Il n’en avait pas moins écrit La Négresse blonde pour son plaisir et le nôtre. Littérairement, ce livre singulier n’appartient à aucune école, sauf la fourestière, comme dit l’à-peu-près de Willy. Il y a des gens qui deviennent célèbres à force de travail, ou de constance, ou d’acharnement ; qui entassent Pélion sur Ossa jusqu’à forcer l’attention. À Fourest, la célébrité était venue, d’un coup, après une incubation et maturation des plus lentes, le jour où il avait fait paraître sa Négresse. Il y aura bientôt soixante ans que le succès de ce petit livre se maintient avec une aimable régularité, et trente qu’elle est entré chez moi, après des années de vagabondage, tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre. »

 

José CORTI, Souvenirs désordonnés

12/04/2013

GEORGES FOUREST : " HORACE "

 

GEORGES FOUREST 

" HORACE "

 

Poème de Georges FOUREST

Lu par Hervé PIERRE

 

La Négresse blonde, 1909 © José Corti

 

Né le 6 avril 1867 à Limoges, Georges FOUREST suit des études de droit. Il se qualifie ensuite d’"avocat loin de la cour d’appel", comme il aime à se nommer. Il vient à Paris, où il fréquente les milieux littéraires symbolistes et décadents, collabore à plusieurs revues (La Connaissance, Le Décadent) et se rend célèbre avec La Négresse blonde (Messein, 1909, rééd. Corti 1986), préfacé par Willy, et placé sous le patronage de Rabelais. Georges Fourest fera encore paraître Contes pour les satyres (Messein, 1923, rééd. Corti, 1990) et le Géranium ovipare (Corti, 1935, réé. 1984), qui respirent une même atmosphère ludique et lubrique. Il meurt à Paris le 25 janvier 1945. Après une période de désaffection, il est peu à peu redécouvert à mesure que se manifeste un regain d’intérêt pour la littérature 1900.    


« Georges Fourest était un poète français à la verve parodique et irrévérencieuse, jouant avec truculence de mots rares ou cocasses, des dissonances de ton, de l’imprévu verbal et métrique, des effets burlesques.

Quand j’ai connu Georges Fourest, il était dans la soixantaine et déjà célèbre. Il ne ressemblait pas plus à l’idée qu’un lecteur de La Négresse blonde pouvait se faire de lui que le Gracq qu’on imaginait au moment de la publication du Château d’Argol ne ressemblait au Gracq réel. Le poète, qui époustouflait les foules et rêvait d’un enterrement délirant, était un homme tout à fait posé et – sauf quand à Deauville il portait veste blanche et casquette de yachtman – vêtu de la classique et déjà désuète jaquette et coiffé du melon dont le règne touchait aussi à sa fin. Il avait l’air bonhomme d’un chef de bureau de ministère. Il n’en avait pas moins écrit La Négresse blonde pour son plaisir et le nôtre. Littérairement, ce livre singulier n’appartient à aucune école, sauf la fourestière, comme dit l’à-peu-près de Willy. Il y a des gens qui deviennent célèbres à force de travail, ou de constance, ou d’acharnement ; qui entassent Pélion sur Ossa jusqu’à forcer l’attention. À Fourest, la célébrité était venue, d’un coup, après une incubation et maturation des plus lentes, le jour où il avait fait paraître sa Négresse. Il y aura bientôt soixante ans que le succès de ce petit livre se maintient avec une aimable régularité, et trente qu’elle est entré chez moi, après des années de vagabondage, tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre. »

 

José CORTI, Souvenirs désordonnés

03/04/2013

PLEURER AU DEDANS 3

PLEURER.jpeg

A l'attention des multiples lecteurs qui arpentent, à juste titre il va de soi, ce lieu modeste certes mais, reconnaissez-le, pas loin d'être génial, cette histoire qui va débuter là sous vos yeux va être fractionnée -- confort de lecture oblige -- en autant d'épisodes qu'il sera nécessaire.
Il suffira donc aux autres, tout aussi nombreux, qui la prendront en cours de narration, de remonter (si cela leur dit mais comment en douter)  le fil du temps récent pour en identifier le fil géniteur...



PLEURER AU DEDANS

3



Comment parvenir à formaliser ce qui de fait échappe à mon langage?

Je survis avec tant de peine à un passé démesurément meurtri, contraint à faire semblant d'ignorer des blessures qui sans cesse s'ouvrent à chaque pas de vie. Et c'est hanté de souvenirs lestés de désespérances impossibles à maîtriser que j'implore le maintenant afin qu'il m'accorde l'inexistant oubli.

C'est ainsi que par protection je me suis peu à peu créé un monde en trompe-l’œil et une identité fictive.

Quelle mise en abîme perverse que celle obtenue par le spectacle corrompu de cette danse macabre qui n'est rien d'autre que celle chorégraphiée par la mort aux aguets.

Alors, silencieux je pleure au dedans tandis que l'irréductible vie continue, stochastique.

FIN

P. MILIQUE